Anecdotes
et faits divers
" Le diable à Montsouris " (début XVIIème)
Un sieur César fut emprisonné pour avoir fait
voir le diable dans les carrières près de l'hôpital Sainte-Anne,
moyennant finances, à certains de ses contemporains crédules.
Le récit édifiant de ses aveux nous est parvenu :
<< J'entre le premier dans la caverne ; puis, avant de passer outre, fe
fais des cercles, des fulminations, des invocations, et récite quelque
discours composés de mots barbares ; lesquels je n'ai pas plutôt
prononcés que le sot curieux et moi entendons remuer de grosses chaînes
de fer et gronder de gros mâtins (...). Je m'avance plus avant en marmonnant
quelques effroyables paroles. Etant arrivé à un endroit que je
connais, je redouble mes invocations et fais des cris comme si j'étais
entré en fureur. Incontinent, six hommes que je fais tenir dans cette
caverne, jettent des flammes de poix résine devant, à droite et
à gauche de nous. A travers les flammes, je fais voir à mon curieux
un grand bouc chargé de grosses chaînes de fer peintes en vermillon
comme si elles étaiaent enflammées. A droite et à gauche,
il y a de gros mâtins à qui on amis la tête dans de longs
instruments de bois, larges par le haut, fort étroits par le bout. A
mesure que ces hommes les piquent, ils hurlent tant qu'ils peuvent, et ce hurlement
retentit de telle façon dans les instruments où ils ont la tête,
qu'il ensort un bruit si épouvantable dans cette caverne, que certes
les cheveux m'en dressent à moi-même d'horreur, quoique je sache
bien ce que c'est. >>
Ce montreur de diable mourut le 11 mai 1615 au fond d'un cachot à la
Bastille.
La terrible et emblématique histoire de Philibert Aspairt (3 nov. 1793)
De son état, portier du Val-de-Grâce, ce dernier
s'aventura le 3 novembre 1793 dans les carrières en empruntant l'entrée
située dans l'enceinte de son lieu de travail. Descendant pour une raison
qui demeure obscure (la légende dit qu'il cherchait le trésor
des Chartreux), il se perdit probablement à court de lumière.
Une équipe de l'IGC, occupée à consolider les carrières
du quartier, retrouvera son corps onze années plus tard, en 1804. Il
fut identifié par les clefs qu'il portait.
En 1810, sous la direction d'Héricart de Thury alors occupé à
décorer l'ossuaire municipal, on profita de l'occasion offerte par des
travaux de consolidation effectués à proximité pour élever
en présence de la veuve Aspairt un magnifique tombeau
à acrotères muni de quelques marches à la manière
des tombes antiques. De la proximité des carrières des Chartreux
naîtra très vite une légende : Philibert Aspairt serait
en fait parti selon les uns à la recherche du trésor des moines
expropriés depuis peu ou, selon les autres, à la recherche de
quelques bonnes bouteilles de ce breuvage qui fit la réputation de l'ordre.
Il est en tous cas le Saint-Patron de tous les cataphiles.
Un
garde-magasin aux Catacombes perdu dans le noir (22 sep. 1860)
Le Moniteur Universel nous raconte la mésaventure de M. Katery qui, voulant faire changer une serrure dans l'une des galeries souterraines s'y rendit avec un serrurier, l'apprenti de cer dernier et un élève architecte. Après un quart d'heure de marche ils atteignirent la galerie mais leur chandelle s'éteignit et ils s'aperçurent qu'ils n'avaient pas d'allumettes. L'imprévoyant garde-magasin ordonna cependant à ses compagnons de le suivre à tâtons et de crier chacun à tour de rôle et cela plusieurs heures. Le groupe arriva enfin vers 2 heures du matin sous un puits de la rue Dugay-Trouin où un passant alerté avait averti la police. On leur lança des allumettes et ils purent surtir par un regard rue Notre-Dame-des-Champs.
Les 2 ouvriers avaient oublié leurs allumettes (21 mars 1863)
Le même journal relate cette histoire de deux ouvriers
carriers. << Entrés le lundi vers midi dans les carrières,
rue du Château-des-Rentiers, au Petit-Ivry, ils eurent la désagréable
surprise de voir leur lampe s'éteindre, et de s'apercevoir qu'ils n'avaient
pas d'alllumettes. Ils errèrent jusqu'au lendemain 7 heures du matin,
et virent le jour filtré de l'ouverture d'un puits, à 70 pieds
au-dessus. L'un d'eux monta, en s'arc-boutant contre les parois, mais, arrivé
contre la plaque, ne put la soulever. Il glissa la lame de son couteau par l'orifice
et la remua en appelant. Un cocher des omnibus des chemins de fer d'Orléans,
qui passait près de cette plaque, boulevard e l'hôpital, aperçut
cet objet brillant qui remuait, et entendit la voix faible d'un homme appelant
au secours. Il donna l'alerte, et avec deux personnes, munis d'une pince en
fer, ils soulevèrent la plaque, et trouvèrent le malheureux les
mains ensanglantées, accroché à l'entrée du puits
béant. Amené à la surface, il indiqua qu'un autre homme
était en bas. Ce dernier, encore plus affaible, fut remonté avec
des cordes >>.
Un squelette décapité (1867)
Cette histoire nous est rapportée par Emile Gérard. << En 1867, lors de la consolidation du boulevard Arago, des ouvriers, en pénétrant dans une petite galerie basse, qui n'avait guère plus de 80 cm de hauteur et qui aboutissait à un puits à eau, situé près de l'ancienne impasse Longue-Avoine, découvrirent un squelette humain, sans trace de vêtements et, à côté, un squelette de chien. L'homme avait eut la tête coupée ; elle gisait à 6 mètres du corps. La galerie dans laquelle on trouva ces restes n'avait pas d'issue ; elle était fermée, d'un côté, par d'anciens remblais de carrière, et de l'autre, par la maçonnerie du puits qui avait été refaite dans le but d'emmurer les cadavres. quel drame s'était passé là ? ... L'enquête n'aboutit point; >>
"
La chasse à l'homme dans les Catacombes " (l'Illustration, 17 juin
1871)
LA CHASSE A L'HOMME
17 juin 1871DANS LES CATACOMBES
<< Cette chasse dans les Catacombes a été
l'un des épisodes les plus dramatiques de ce grand drame de la prise
de Paris par l'armée de Versailles.
Nous devions donc en conserver le souvenir par un dessin et en dire quelques
mots.
La lutte à travers les rues de la ville est terminée.
Les insurgés ont été forcés dans toutes leurs
positions.
Ceux qui n'ont pas été tués en combattant, pris ou fusillés,
ont tous cherché leur salut dans la fuite.
Les uns se sont réfugiés dans les égoûts, les autres
dans les carrières d'Amérique, d'autres enfin, en plus grand
nombre, dans les Catacombes.
Aucun des ces asiles ne devait les protéger.
Traqués et atteints partout, ils furent tous ou tués sur place
ou faits prisonniers, et conduits à Versailles.
C'est dans les premiers jours de ce mois que commença la chasse à
l'homme dans les Catacombes. Des troupes y pénétrèrent
par la porte de la barrière d'Enfer, tandis que d'autres troupes occupaient
solidement l'autre porte ouvrant sur la plaine de Montsouris. Puis, armés
de torches, les soldats descendirent avec précaution dans l'immense
ossuaire.
Ce qui s'y passa alors se devine sans peine.
Notre dessin parle trop éloquemment pour que nous jugions nécessaire
de nous mettre en frais de description. Horrible a dû être cette
lutte suprême, à la lueur rouge des torches, éclairant
étrangément les visages contractés des combattants. Piétinements
furieux, cris de colère et cirs de douleur, râles d'agonie, et
le cliquetis des baïonnettes et les détonations ; quelle scène!
Tout cela dans les longs couloirs de ces cryptes tapissées d'ossements,
sous l'oeil même des morts, troublés dans le repos qui leur avait
été promis! En effet : << Au delà de ces bornes
ils reposent en attendant la vie bienheureuse,>> est-il écrit
en latin sur la porte où on descend chez eux : Has ultrà
metas requiescunt beatam spem expectantes.
C.P. >>
" Quant un employé de l'IGC organise ses propres visites clandestines
dans les Catacombes et en tire rémunérations " (1874)
Cette étonnante histoire m'a été transmise par Brewal, suite à des recherches effectuées à la bibliothèque historique de la ville de Paris ; qu'il en soit ici remercié. Le rapport est transcrit dans son intégralité ; c'est un régal !
<< Objet du rapport : Visite des carrières souterraines
organisée sans autorisation 28 février 1874
Rapport de l'Inspecteur des Mines
Il résulte d'un rapport de l'officier de paix du quatorzième arrondissement
qu'une visite des carrières a eu lieu sans autorisation dans la nuit du 31 janvier
au 1er février, sous le conduite du Sieur Marcellin, garde-magasin de l'Inspection
des Carrières. Le Sieur Marcellin s'est entendu avec quelques jeunes gens disant
faire parti d'une société chorale qui lui ont demandé de descendre dans les
carrières pour y chanter des chants. Parmi ces jeunes gens dont le nombre a
grossi au dernier moment jusqu'à atteindre environ 25 personnes, se trouvaient
les Sieurs Grenier, Fournier, Daix, Sénéchal, tous inconnus de l'Inspection.
Rendez-vous avait été pris par eux chez le Sieur Berton, marchand de vin, au
coin de la rue d'Enfer et du boulevard Arago ; à dix heures du soir, le groupe
est descendu dans les carrières par l'escalier du boulevard Saint Jacques, s'est
rendu aux environs de l'Ossuaire municipal au lieu-dit Port-Mahon où on a bu
et chanté, et est remonté après un assez long parcours par l'escalier de la
chaussée du Maine. Rencontrés par des sergents de ville lorsqu'ils revenaient
en troupe vers la place d'Enfer, sans doute pour se livrer à de nouvelles libations
chez le Sieur Berton, plusieurs d'entre eux ont été interrogé et conduits au
poste, et, parmi eux, le Sieur Marcellin. Celui-ci nous a spontanément avoué
sa faute le 2 février, en témoignant le plus grand repentir. Il dit qu'aucun
des visiteurs n'était ivre, qu'on a seulement bu quelques bouteilles en chantant
dans les carrières, et soutient n'avoir reçu d'argent de personne pour prix
de sa coupable complaisance. Nous avons immédiatement infligé à cet agent une
amende de 20 francs, nous réservant d'agir plus sévèrement à son égard après
une enquête détaillée.
La lettre de Monsieur le Préfet de Police, du 11 février, dont nous venons de
recevoir communication, porte que, d'après Monsieur le commissaire de Police,
le Sieur Marcellin a tiré profit de sa visite, ayant reçu de l'argent de plusieurs
invités. Il ne nous a pas été possible de vérifier ce point. Il importe de remarquer
toutefois, ce qui atténue dans une certaine mesure la culpabilité du Sieur Marcellin,
que la visite n'a pas eu lieu dans l'Ossuaire, dont les portes sont fermées
par des clés qui sont exclusivement entre les mains de Monsieur l'Inspecteur
Général des Carrières et de l'Ingénieur soussigné, et il n'y a lieu d'entendre
par le mot Catacombes que les Carrières souterraines existant sous Paris. Le
Sieur Macellin qui a la clé des diverses entrées des carrières, en sa qualité
de garde-magasin a commis une faute incontestable en organisant nuitamment dont
il s'agit. Mais cet agent n'est a proprement parler qu'un simple ouvrier touchant
un salaire journalier de 4 francs, chargé de menues réparations au matériel
employé aux consolidations des carrières et de veiller à la sûreté du magasin
de l'Inspection, situé dans une cour dépendant de l'un des anciens pavillons
de l'Octroi, à la barrière d'Enfer. entré dans le service des carrières le 1er
décembre 1864, en qualité de terrassier avec un salaire journalier de 2,75 francs,
le Sieur Marcellin a été choisi comme garde-magasin par mon prédécesseur le
20 septembre 1871, en remplacement d'un Sieur Meymat renvoyé pour participation
à la Commune. Il fallait que sa probité fût bien établie pour que le choix se
soit porté sur lui. Pour nous, depuis plus de vingt mois que nous le voyons
dans l'Inspection, nous n'avons eu jusqu'à cet incident aucun reproche à lui
faire au point de vue du service. Nous estimons qu'une présence de dix ans dans
les ateliers de l'Inspection, sans que le Sieur Marcellin donnât lieu à aucune
plainte, mérite à cet ouvrier d'être traité avec indulgence. Nous reconnaissons
que la visite à laquelle il n'a pas eu l'énergie de se refuser, a eu trop de
retentissement pour que l'amende de vingt francs infligée de prime abord au
Sieur Marcellin constitue une punition suffisante et nous proposons de descendre
son salaire journalier de 4 frs à 3,5 francs pendant une période de trois mois.
Il ne faudrait pas s'exagérer d'ailleurs la faute commise. Les carrières ne
constituent pas un lieu inviolable loin de là. Les champignonnistes y accèdent
librement pas leurs puits ; il en est de même d'un certain nombre de propriétaires
dans Paris. Dès lors le fait d'avoir facilité la visite des carrières constitue
une faute assimilable seulement à une infraction à la discipline des ateliers.
Dans le cas où Monsieur l'Inspecteur Général jugerait toutefois devoir remplacer
le Sieur Marcellin comme garde-magasin, j'aurais l'honneur de proposer un remplaçant
à bref délai, et je demanderais à continuer à employer cet ouvrier, mais seulement
dans les ateliers souterrains.
Paris, le 19 février 1874
L'Ingénieur des Mines. O. Keller
Carte d'invitation jointe au rapport : " Henri Grenier vous invite à
visiter les Catacombes le 31 janvier demain chez M. Berton au coin de la rue
d'Enfer et du boulevard Arago à 8 heures du soir. Venir en tenue la plus négligée
et on soupera dans les Catacombes." >>
"
Concert de nuit dans les Catacombes " (Le Journal, 3 avril 1897)
<< Quelques rares privilégiés ce qu'il est convenu d'appeler des Parisiens de marque étaient conviés, cette nuit à une petite fête qui ne manquait ni d'originalité, ni d'imprévu. L'invitation est ainsi conçue :
Monsieur..... est prié d'assister au concert des catacombes, organisé par MM Pierres et Jouaneau, à onze heures.
Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable.
A l'heure dite, une centaine de personnes se faufilaient par une
étroite porte de la rue Dareau, et commençaient la descente de l'interminable
escalier qui mène aux catacombes. Des hommes noirs
et fort accueillants, guidaient la route avec des
bougies, dont la lueur tremblante éclairait mélancoliquement les rangées de
crânes, les colonnettes de tibias, qui sont la gloire macabre de notre capitale.
Pourquoi, comment cette fête?
Renseignements pris, nous apprenons ceci : quelques jeunes gens, des littérateurs,
des peintres, des musiciens, devisant certain soir après joyeux repas, constatèrent
unanimement que la marche funèbre de Chopin, jouée la nuit, dans le décor pittoresque
des catacombes ne pouvait manquer de produire sur les auditeurs une impression
assez... caractéristique.
On résolut immédiatement de mettre ce projet à exécution. Il ne pouvait être
question de demander aux autorités responsables une autorisation qui eût été
certainement refusée ; mais l'un des conjurés avait d'étroites relations de
camaraderie avec un ingénieur compétent qui n'autorisa pas, mais promit de fermer
les yeux.
Ainsi fut fait!
Et le concert eût lieu, il ne faut s'étonner de rien à Paris !
L'impression fut, du reste, ce que les organisateurs avaient souhaités qu'elle
fut : macabre. Un orchestre composé d'éléments excellents, recrutés parmi les
artistes de l'Opéra, etc., exécuta la Marche de Chopin, la Danse macabre
et d'autres morceaux de circonstance.
A une heure et demie, les récitants troublaient encore d'une voie mal assurée
le repos de l'ossuaire.
A deux heures, se terminait une fête, sans précédent comme sans lendemain, je
le crains !
Ad. M. >>
Un
faux guide des Catacombes détourne un groupe de 50 visiteurs (21 juin
1948)
Le journal Combat du 22 juin 1948 conte cette amusante anecdote. << Une plaisanterie assez inattendue s'est déroulée dans les Catacombes au cours de la visite de l'après-midi. Un mystificateur, dont on ignore l'identité, profitant du fait que les guides officiels ne portent ni uniforme ni insigne, se substitua à l'un d'eux et entraîna un groupe de visiteurs dans des galeries interdites au public. A 19 heures, les employés de l'Administration des Carrières constatèrent avec effroi, que sur 732 visiteurs, une cinquantaine n'avaient pas franchi le portillon enregistreur de la sortie. Aussitôt, tous les employés mobilisés procédèrent, dans les galeries qui vont de de la Porte d'Orléans au boulevard Saint-Michel, à grands sons de trompes avertissantes, à des battues qui se prolongèrent jusqu'à 2 heures du matin. Finalement la petite troupe fut retrouvée saine et sauve... dans la cour du Val-de-Grâce. On eut, plus tard, l'explication du mystère : le faux guide qui connaissait parfaitement les lieux, avait entraîné ses victimes à travers le dédale de certains couloirs interdits en raison même de leur complexité et les avait conduits jusqu'à la sortie désaffectée qui se trouve dans l'hôpital du Val-de-Grâce. Il s'empressa de disparaître dès que les vrais guides se présentèrent. Parmi les hommes en détresse se trouvait l'un des gardiens de la paix charger de surveiller les visiteurs. >>
L'histoire
du petit Romain, coincé par un éboulement (31 mai 1987)
[Merci à Titan pour ce doc.]
Un
couple échoué dans le réseau du 16éme arrondissement
(Le Parisien, fin des années 90)
Ce fait divers est connu des cataphiles car il est à l'origine de la
fermeture du très beau réseau du 16ème arrondissement.
[Merci à H20 pour ce doc.]